Contexte :
Les membres de la famille d’une personne décédée par suicide ont un risque accru de souffrir de dépression, de stress post-traumatique, d’idées suicidaires et de suicide. Cependant, malgré l’expérience de la perte d’un membre de la famille par suicide, la plupart des familles continuent de fonctionner et de bien vivre après cette expérience difficile.
Objectif :
Cette étude a cherché à comprendre et à décrire le processus de transformation qui se produit chez les membres de la famille survivants en utilisant une approche de théorie ancrée.
Méthodes
- La théorie ancrée suggère que les acteurs sociaux sont les seuls à pouvoir indiquer au chercheur le sens qu’ils donnent au monde social qui les entoure, et que la connaissance se développe de manière inductive.
- Cette approche est utile en soins infirmiers, car elle permet d’élaborer une théorie explicative du comportement humain dans un contexte particulier.
- Sept familles ayant vécu la perte d’un adolescent par suicide ont participé à cette étude qualitative.
Résultats et discussion
Les résultats décrivent le processus de transformation vécu par la famille. Même si le suicide d’un adolescent est un événement choquant, il n’en demeure pas moins que les familles peuvent aussi passer par un processus de croissance, qui pourrait être identifié comme l’émergence malgré la blessure indélébile.
Selon la théorie ancrée développée dans cette étude, le suicide est un bouleversement, suivi d’une période d’enfoncement qui est tempérée par la présence de « bouées de sauvetage », c’est-à-dire de soutiens que l’on peut trouver au sein des familles ou auprès de leur entourage. Suit une période d’émergence où la famille agit pour rebondir. Cela dit, il est nécessaire pour les infirmières de famille de comprendre ce processus de transformation afin de mieux soutenir les membres survivants de la famille et d’améliorer la prise en charge de la postvention du suicide.
Les résultats de cette étude sont cohérents avec la littérature sur le deuil par suicide. Les émotions exprimées par les participants de cette étude sont similaires à celles mentionnées dans les recherches précédentes, telles que la surprise, la tristesse, la culpabilité et la colère. Cependant, un résultat important de cette étude est que les membres de la famille ressentent parfois de la colère envers les professionnels, comme les infirmières, qui n’ont pas été en mesure d’aider l’adolescent avant sa mort. Cette colère pourrait nuire à la relation thérapeutique qui est essentielle à la guérison. Il est donc important que les infirmières ne se sentent pas menacées par cette colère, qui n’est pas dirigée contre elles personnellement.
La contribution de cette recherche à la littérature est qu’elle a étudié non seulement l’impact négatif du suicide, mais aussi la transformation positive qu’il peut apporter. Tout comme Moore et al. (2015), cette étude a révélé qu’une croissance post-traumatique est possible après le suicide d’un adolescent. La description de la manière dont cette croissance s’est produite révèle que le processus prend du temps, parfois des mois, voire des années. Les familles de la présente étude ont démontré des changements positifs à différents niveaux : individuel, unité familiale et dans leur vision globale de la vie.
Auteurs : Christine Genest, Francine Gratton, Tara O’Reilly , Émilie Allard , Nathalie Maltais (2021)
Cliquez ici pour lire l’article complet : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33855903/